Pages

lundi 14 janvier 2013

Narrateurs, mais pas héros: le cas particulier des narrateurs-spectateurs.




Bonjour à tous et à toutes!

Bienvenue sur le blog pour un nouvel article! Cela faisait longtemps que je n'avais pas fait d'article de fond, et je suis ravie de pouvoir vous en proposer un aujourd'hui! J'ai décidé de vous parler des narrateurs: très importants, ils sont les moteurs de l'histoire, puisqu'ils sont ceux qui la racontent. Les narrateurs peuvent être internes, autrement dit dans l'histoire, ou externes, extérieur à l'histoire. Mais aujourd'hui, je vais me pencher sur un cas un peu particulier, celui des narrateurs présents dans l'histoire, mais qui n'en sont pas pour autant les héros! Aujourd'hui, si ce procédé est un peu moins présent, il est néanmoins présent dans beaucoup de livres, et je ne pouvais pas passer à côté.


Qu'est-ce qu'un narrateur-spectateur?




Comme je l'ai dit plus haut, le narrateur est vraiment très important dans l'histoire, car il est en quelque sorte le témoin de celle-ci, celui qui sert de lien entre les événements et le lecteur. Le choix du type de narrateur n'est pas anodin, et est capital pour l'auteur.


Celui-ci peut choisir comme narrateur le héros: celui qui vit l'action la raconte aussi, et nous dévoile dans le même temps ses pensées, ses impressions. Il peut aussi choisir un narrateur externe, qui ne se mêle pas à l'histoire; ou encore un narrateur interne, qui parle à la première personne, mais qui n'est pas le héros. Ce dernier est celui que j'appelle le narrateur-spectateur, car son rôle se limite à rapporter une action, même si il y participe quelques fois. C'est sur lui que nous allons nous pencher aujourd'hui.


Le narrateur-confident.


(un beau tableau de Renoir, idéal pour illustrer cet article)



Commençons par un cas un peu spécial, mais le plus simple: celui du narrateur-confident. Ce type de narrateur ne joue aucun rôle dans l'histoire, il ne participe pas à l'action, mais recueille tout simplement les confidences d'un autre personnage, le plus souvent le héros.


Généralement, l'histoire est construite sous forme d'un récit enchâssé: tout d'abord, nous découvrons le narrateur, qui nous raconte le plus souvent un voyage, au cours duquel il rencontre le fameux héros, le plus souvent un héros affaibli, qui lui dévoile son histoire. Le narrateur couche alors l'histoire sur le papier, en expliquant qu'il ne pouvait pas laisser une histoire pareille inconnue de tous!

On en trouve des exemples dans plusieurs histoires. Voici quelques exemples, ainsi que la sensation donnée par l'utilisation de ces narrateurs.

-dans Pauline, d'Alexandre Dumas, le narrateur (qui n'est autre qu'Alexandre Dumas lui-même) rencontre Alfred de Nerval qui lui raconte son histoire avec Pauline. Dumas fait fort dans ce livre, en nous proposant un double-récit enchâssé: tout d'abord, l'histoire d'Alfred racontée à Dumas, puis l'histoire de Pauline racontée à Alfred. Dumas sert ici vraiment de confident à Alfred qui se libère d'un poids. L'auteur s'utilise ici comme narrateur, afin de donner du crédit à son histoire, crédit renforcé par le fait qu'il ne sert que de confident. Son récit est en effet bien plus fort que si il s'était contenté de raconter tout simplement l'histoire de Pauline, sans les étapes de récit enchâssé.



-dans Manon Lescaut de l'abbé Prevost, on a également le cas d'un narrateur-confident. Le narrateur, c'est Renencourt, un "homme de qualité", qui rencontre le Chevalier des Grieux, le malheureux héros de l'histoire. Alors qu'il ne connait que très peu le narrateur, le Chevalier des Grieux va lui faire le récit de son amour passionné mais compliqué pour Manon. Contrairement à Pauline, Manon Lescaut est un roman très scandaleux car la demoiselle n'est pas une femme vertueuse, bien au contraire: elle se fait entretenir. Il s'agit ici d'une histoire de moeurs, et le but du récit enchâssé et du narrateur confident est vraiment d'éloigner au possible le narrateur (et donc l'auteur) de ces pratiques douteuses. Le narrateur, en parlant de cette histoire, joue alors le rôle d'un moralisateur, qui dit au lecteur "prenez-en de la graine!".

-dans Frankenstein de Mary Shelley: le narrateur est Robert Walton, parti pour une expédition polaire, au cours de laquelle il fait la connaissance du très affaibli Victor Frankenstein, qui lui dévoile l'horrible secret qu'il fuit désespérément, celui de la créature (bien sûr!). Mary Shelley se place dans une esthétique romantique par cette pratique, puisque ce procédé a beaucoup été utilisé par les romantiques. Robert Walton est le spectateur de la détresse d'un homme. L'intérêt du narrateur ici est de débarrasser l'histoire d'éventuels jugements de valeur qui pourraient être donnés par le héros, afin de nous laisser libres d'avoir notre propre avis sur l'histoire.

(Aidan Quinn dans le rôle de Robert Walton)




Une mise en avant du héros:


Dans certains cas, le narrateur joue un rôle différent de celui de confident. Il ne se contente pas de recueillir l'histoire d'un autre individu, il prend aussi part à l'action.


Généralement, dans ces cas là, le narrateur est un ami du héros, et écrit les aventures de son compagnon, des aventures auxquelles il peut aussi participer. Deux exemples viennent tout de suite en tête: le Docteur Watson, chez Conan Doyle, et le narrateur des aventures de Dupin chez Edgar Allan Poe.

(Sherlock et Watson)


Ces deux narrateurs sont similaires: il s'agit d'hommes assez brillants (le docteur Watson est quand même médecin!), qui fréquentent des cercles de gens cultivés, et dont l'ami le plus proche est encore plus brillant, doté de capacités extraordinaires. Nous parlons bien sûr de Dupin, et de Sherlock Holmes (pour la petite histoire, Conan Doyle s'est inspiré de Dupin pour créer son célèbre héros). Ces deux hommes sont capables de résoudre des cas très complexes, sans le moindre problème, et possèdent une intelligence hors du commun.

(La version BBC)


Pourquoi donc avoir un narrateur comme Watson? Tout simplement pour mettre en avant le héros, et avant tout ses capacités, son don. Watson prend part à l'action, il est actif, aide souvent Sherlock a mettre en place des plans pour confondre ses adversaires; mais il joue quand même le rôle d'un faire-valoir auprès de Sherlock, le véritable héros des histoires créées par Conan Doyle. Le personnage de Watson sert donc à raconter l'histoire, mais plus encore à apporter une réelle mise en valeur de Sherlock: imaginez les mêmes histoires, mais racontées par Sherlock. L'effet ne serait pas du tout le même, et je doute que les lecteurs auraient autant aimé. Watson, en étant proche de nous (il faut le dire, la plupart du temps, il ne comprend rien), nous permet d'adhérer à l'histoire.



Le choix du narrateur n'est donc pas anodin pour l'auteur, et je trouve qu'il est important de ne pas ignorer ceux qui ne sont pas les héros de l'histoire. On se retrouve très vite pour un nouvel article!


AnGee Ersatz*

La Page Facebook.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire